Michelangelo Merisi da Caravaggio (1571-1610) plus connu sous le nom du Caravage, est probablement l’un des artistes italiens les plus tourmentés de la Renaissance. Sa vie est intense et parsemée aussi bien d’embûches que de chefs d’œuvre. Pour analyser l'oeuvre David tenant la tête de Goliath et en comprendre l'origine, c'est donc vers la vie mouvementée du Caravage qu'il faut se tourner.
Le Caravage : un clair-obscur inimitable
Le Caravage grandit à Milan puis à Caravaggio, dans un foyer confortable. Il commence à s’imprégner très jeune des œuvres des maîtres de son temps, notamment Léonard de Vinci ou Titien. On retrouve en effet chez le Caravage une influence de l'école vénitienne dans l’intensité des traits conférés à ses portraits et dans son gout prononcé pour les contrastes.
Ses œuvres sont reconnaissables entre toutes : teintées de ce fameux clair-obscur si cher à l’artiste, elles sont d’un naturalisme brutal qui choquera parfois ses contemporains. Il sait donner vie aux personnages qu’il représente et puise son inspiration dans une iconographie relativement classique puisque principalement issue de la mythologie ou des récits bibliques. Son originalité tient plutôt à ses portraits et c'est dans la représentation des visages que tout le génie du Caravage se révèle. Il peint d’une manière extrêmement réaliste et offre précision, justesse et expressivité à ses protagonistes.
Le Caravage : une vie en exil
Mais au-delà de son talent, le Caravage est un homme complexe, attiré par la noirceur et les bas-fonds des villes qu’il traverse. D'un caractère bagarreur, il aime trainer dans les tavernes et recherche la compagnie des prostituées et des voyous, allant même jusqu'à leur demander de jouer les modèles pour ses toiles. Ses fréquentations et le fait qu’il ose s’en inspirer pour peindre lui valent d’ailleurs d’être régulièrement en conflit avec Rome. Difficile en effet pour l'Eglise d’accepter qu’une peinture de la Vierge Marie, aussi réussie fut-elle, ait été réalisée à partir du visage d'une prostituée, comme le veut la rumeur pour la Mort de la Vierge (1606), conservée au musée du Louvre.
Lorsque l'artiste peint cette toile, il a 38 ans, et traverse une période particulièrement trouble : quelques années auparavant, alors qu'il vit à Rome, il commet l'irréparable, et tue un homme au cours d'une altercation. Dans la foulée, il fuit la ville pour échapper à son procès et devient un artiste errant. En 1509, moins d'un an avant sa mort, il réalise alors son ultime autoportrait.
David tenant la tête de Goliath : l'ultime autoportrait du Caravage
En effet l'artiste a pris l'habitude de se représenter à travers les protagonistes de ses oeuvres, et c'est ici sous les traits de Goliath qu'il apparait. Au-delà du thème annoncé, Le Caravage réalise ainsi son autocritique et se condamne lui-même. Pas de fronde dans ce combat mais une épée et un jeune David en pleine lumière, empoignant fermement la tête du géant terrassé (geste que l'on retrouve notamment dans sa représentation de Salomé avec la tête de Saint-Jean Baptiste, 1607, exposée à la National Gallery de Londres). Au centre de la toile, le héros place son bras meurtrier légèrement en retrait, presque tapis dans l'ombre et présente son trophée au spectateur, dans un mélange de fierté et de résignation. Comme toujours, Le Caravage n'épargne aucun détail au spectateur et la lividité cadavérique de Goliath est représentée avec un réalisme saisissant.
Triomphe du bien sur le mal, l'oeuvre est aussi une reconnaissance de culpabilité de la part du Caravage pour le meurtre commis à Rome et pour lequel il cherche à se faire gracier par le Pape Paul V. Peu de détails sur les derniers mois de sa vie sont parvenus jusqu'à nous, mais il décédera en Toscane en 1610, avant d'avoir pu obtenir le pardon tant attendu.
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